Une expérimentation pour réguler les pics de fréquentation sur la ligne b

27/08/2025

  • Temps de lecture 9 minutes
  • Publié le
  • Mis à jour le
  • La ligne b connaît des pics de fréquentation très élevés le matin de 7h30 à 8h, entre les stations Sainte-Anne et Beaulieu-Université, dans ce périmètre se situent de nombreux établissements d'enseignement.
  • Ces sur-fréquentations affectent le confort des usagers et parfois, leur possibilité d'emprunter une rame au moment où ils le souhaitent. Rennes Métropole, Keolis et des établissements d'enseignement du secondaire ont étudié la manière d'y remédier.
  • À la clef : la signature d'une charte entre Rennes Métropole, Keolis Rennes et quatre établissements scolaires rennais qui expérimenteront, à la rentrée de septembre 2025, de nouveaux horaires de cours le matin.

Forte de son succès, la ligne b du métro de Rennes Métropole connaît des pics de fréquentation très élevés et très rapprochés le matin entre 7h30 et 8h, en direction de Cesson-Viasilva. Durant ces pics, plusieurs dizaines d'usagers du métro peuvent rester à quai à la station Sainte-Anne après le départ de la rame, qui accueille idéalement 160 passagers environ au maximum.

Cette problématique concerne la partie nord de la ligne b, dans un périmètre qui compte, entre les stations Sainte-Anne et Beaulieu-Université, 18 établissements scolaires et universitaires. Dans ce secteur, plus de 30 000 étudiants et élèves du secondaire se déplacent quotidiennement.

Sur une plage horaire de 30 minutes, de 7h30 à 8h mais aussi dans une moindre mesure, à 8h40, un phénomène d'"hyperpointe" affecte le niveau de confort des usagers. Les problèmes générés sont multiples : allongement des temps d'attente en station et donc des temps de déplacement globaux, difficultés à accéder aux rames, hausse des incidents à bord des rames (sacs ou vestes des voyageurs coincées dans les portes par exemple)... Ces problématiques nuisent à la fois à l'équilibre des temps de vie des usagers et à la qualité du service public.      

Descentes sur la ligne b en direction de Cesson-Via Silva par tranches de 5 mn, sur une journée de semaine classique, une journée de semaine de vacances scolaires (mais pas étudiante), une journée de semaine de vacances scolaires totales.

Les descentes des rames sont, sur ces périodes d'hyperpointes, principalement regroupées aux stations Joliot-Curie - Chateaubriand (jusqu'à 200 descentes en 5 min pour cette station) et Beaulieu Université (jusqu'à 170 descentes en 5 mn).      

Agir sur les usages temporels du métro

Après l'expérience réussie sur la ligne a du métro en 2012, le Bureau des temps de Rennes Métropole a été missionné pour mener un travail afin de lisser la fréquentation du métro ligne b, en particulier entre les stations Jules-Ferry et Cesson-Viasilva, pour parvenir à écrêter les hyperpointes.

L'enjeu :

  • Limiter les périodes avec plus de 500 descentes du métro en 5 minutes en cumulé dans les sept stations, de Jules-Ferry à Cesson-Viasilva, dans le sens Saint-Jacques-Gaîté - Cesson-Viasilva ;
  • Réguler l'emport de passagers (nombre de passagers à bord de chaque rame à tout instant) à un maximum de 160 voyageurs par rame.

La méthode : trouver une autre modalité d'organisation temporelle dans les établissements de ce périmètre.

Il s'agit de reporter une partie des usagers du métro sur la période plus creuse de 8h-8h30. Cela permet d'étaler les déplacements et de limiter le phénomène d'hyperpointe.       

Trois établissements scolaires expérimentent une modification de leurs horaires

Dans un premier temps, les lycées Chateaubriand, Joliot-Curie, et le lycée-collège Assomption s'engagent à décaler leurs horaires de début des cours à la rentrée 2025. La modification des emplois du temps, à l'entame de la journée, peut avoir des effets déterminants.

Ces trois établissements, ciblés en première phase d'expérimentation, ont, compte tenu de leurs effectifs (5 700 jeunes au total), un impact important sur les flux d'usagers.

L'expérimentation débutera le 1er septembre 2025.

Ainsi, l'horaire du début des cours sera retardé de :

  • 15 minutes, soit un début des cours à 8h15 pour les lycéens et les élèves des Classes Préparatoires aux Grandes Écoles (CPGE) de Chateaubriand, avec une option de maintien d'une partie des CPGE à 8h. 1900 élèves sont concernés ;
  • 15 minutes, soit un début des cours à 8h25 pour les lycéens et les élèves de BTS de Joliot-Curie. 1 000 élèves concernés ;
  • 5 minutes, soit un début des cours à 8h15 pour les collégiens et lycéens à Assomption. 1 200 jeunes sont concernés.

Le lycée de La Salle, également signataire de la charte, s'engage à ne pas décaler ses horaires pour la bonne régulation des flux sur la zone.  

Ce dispositif sera en test durant un an. Si les résultats s'avèrent concluants, il sera pérennisé et l'Université de Rennes pourrait éventuellement y être intégrée à partir de la rentrée 2026.      

Deux ans d'études

Le Bureau des Temps, en lien avec la Direction de la mobilité et des transports de Rennes Métropole et Keolis Rennes, a travaillé sur les usages et les comportements horaires des usagers. Il a associé à ses réflexions l'ensemble des 18 établissements d'enseignement concernés.

Après des premières rencontres avec l'Université, les instances académiques et les établissements secondaires, Rennes Métropole et Keolis Rennes ont mené plusieurs phases de diagnostic et de scénarisation. Le travail s'est échelonné entre 2023 et 2025.

Plusieurs données ont permis de réaliser un diagnostic complet, en complément d'observations de terrain en station et sur le campus Beaulieu : billettique du réseau de transport, données de comptage portes palières de la ligne b du métro (par tranche de 5 minutes), volumes aux stations et heures congestionnées, volumes et horaires de début des cours des établissements...      

Les enseignements du diagnostic

Ce diagnostic a permis de dresser plusieurs constats :

  • Le chevauchement d'un pic d'élèves du secondaire et d'un pic d'étudiants pendant l'hyperpointe de 7h35 ;
  • Deux stations fortement congestionnées lors de l'hyperpointe de 7h35 : Beaulieu Université (7h30) et Joliot-Curie - Chateaubriand (7h40) ;
  • Ce phénomène coïncide avec les heures de démarrage des cours des 18 établissements scolaires et universitaires de la zone ;
  • Le diagnostic a permis d'identifier les établissements les plus concernés : les lycées Joliot-Curie, Chateaubriand, de La Salle et le collège-lycée Assomption (5 700 élèves et étudiants au total) et le campus Beaulieu de l'Université (11 000 étudiants).

Le diagnostic a été présenté à l'Université de Rennes et aux quatre établissements secondaires les plus concernés, ainsi qu'aux autorités académiques et collectivités référentes (lycées Joliot-Curie, Chateaubriand, de La Salle et collège-lycée Assomption ; Académie de Rennes, Direction diocésaine de l'Enseignement catholique d'Ille-et-Vilaine ; Région Bretagne, Département d'Ille-et-Vilaine).      

Vers l'élaboration de l'expérimentation

Un diagnostic affiné s'est intéressé aux quatre établissements du secondaire particulièrement concernés : les lycées Joliot-Curie, Chateaubriand, de La Salle et le collège-lycée Assomption.

Une enquête a été réalisée auprès de leurs élèves et étudiants. Elle a montré que : 

  • Plus de la moitié des 5 700 élèves de ces quatre établissements utilisent la ligne b (53%) ;
  • La ligne b est le premier mode de transport utilisé, quel que soit le jour de la semaine ;
  • Ce sont les lycéens qui utilisent le plus la ligne b (70%) ;
  • Ils montent principalement aux stations Gares, Sainte-Anne, Cesson-Viasilva et descendent principalement à Joliot-Curie - Chateaubriand et Gros-Chêne.
  • Près de 6 élèves sur 10 montent dans une rame du métro entre 7h30 et 8h, et plus de 6 élèves sur 10 descendent à la station Joliot-Curie - Chateaubriand.

À la suite de ces nouveaux diagnostics, 59 scénarios de décalage horaire ont été testés, entre mai 2024 et avril 2025, dans un processus itératif mené avec les établissements permettant de prendre en compte leurs contraintes propres. Cette période d'études a permis de déterminer les termes de l'expérimentation qui débutera le 1er septembre prochain.      

Agir sur les usages temporels : l'expérience réussie de la ligne a

Le travail mené sur la ligne a par Rennes Métropole, sa Direction de la mobilité et des transports, son Bureau des temps, et Keolis Rennes de 2009 à 2012, en lien avec les différents acteurs du secteur, avait permis d'agir sur l'hyper fréquentation de la ligne entre les stations Sainte-Anne et Villejean-Université. Le décalage des cours de l'Université de Rennes 2 pour une partie des étudiants (+15 minutes) avait rapidement lissé la fréquentation du métro en heure de pointe. Une baisse de 14% de la charge moyenne des rames entre les stations les plus congestionnées avait été observée, ce qui a permis d'améliorer le confort de tous les voyageurs et de lisser des investissements dans le temps.      

Le Bureau des temps

Le Bureau des temps, service de Rennes Métropole, a pour mission d'adapter les horaires des services publics et l'organisation temporelle du territoire (aménagement, déplacements...), en considérant les attentes des usagers et la qualité de vie.

Créé en 2002, le Bureau des temps poursuit trois objectifs principaux à l'échelle de la métropole.

1 - Favoriser plus d'égalité sociale

Le temps révèle et creuse des inégalités sociales : entre ceux qui peuvent accéder à des services et ceux qui sont contraints par des horaires imposés ; entre les femmes et les hommes ; entre les habitants des centres-villes et ceux des périphéries.

Les conditions de travail des agents d'entretien de la Ville de Rennes ont fait l'objet des premières actions menées par le Bureau des temps. Intervenant auparavant en horaires décalés, les agents travaillent depuis 2005 sur des horaires de journée. Cette réorganisation a notamment permis une meilleure conciliation entre vie professionnelle et vie personnelle. De nombreuses entreprises et collectivités se sont, depuis, inspirées de cette démarche.  

Plus récemment, des travaux sur les horaires d'ouverture des équipements publics (bibliothèques, musées, piscines, parcs et jardins...) ont été menés, permettant d'améliorer l'accessibilité de ces services pour les usagers, tout en veillant à maintenir un cadre de travail de qualité pour les agents.

2 - Rendre le territoire plus fluide et agréable à vivre

Les déplacements ont un impact sur l'environnement et la qualité de l'air, mais également sur la répartition du temps au quotidien. Pour en améliorer l'usage, l'approche temporelle propose, par exemple, de décaler les horaires scolaires ou universitaires, ou d'ajuster les horaires et les modes de travail afin de limiter les encombrements sur les routes et dans les transports collectifs.

L'une des actions emblématiques du Bureau des temps est celle menée sur la ligne a du métro avec l'université de Rennes 2, pour réduire l'encombrement des rames en heure de pointe le matin.

3 - Agir en faveur des transitions

L'approche temporelle répond aussi à des enjeux de sobriété foncière, économique et écologique, et contribue ainsi à repenser l'aménagement du territoire. La réponse aux besoins d'infrastructures (bâtiments, routes...) ne peut plus être de construire systématiquement, alors que ces équipements sont peu utilisés, voire sous-occupés une partie du temps. Nous devons changer nos habitudes et nos modes de conception de la ville, en améliorant l'usage de ce que nous avons déjà tout en favorisant des synergies vertueuses entre usagers.

On parle ici de chronotopie (chronos : temps et topos : lieu, endroit). S'intéresser aux temps d'usage permet de repenser l'utilisation des espaces. Une démarche menée par le Bureau des temps est en cours dans le bâti scolaire afin d'aller vers plus de mutualisations et de polyvalence, tout en veillant à de bonnes conditions d'utilisation partagées.